Aernoudt, un chevalier blanc flamand en Wallonie

Rudy Aernoudt, 48 ans, président du parti LiDé et professeur d’économie, veut réunir Flamands et Wallons et redynamiser la Belgique. Comment ? En encourageant l’esprit d’initiative et en s’attaquant à la corruption.


Rudy Aernoudt

Rudy Aernoudt a deux maisons : à Laethem-Saint-Martin, commune néerlandophone située en région flamande près de Gand, et à Lustin, en province de Namur (région wallonne). Il parle, bien sûr, les deux langues. Mais il n’a qu’un pays, la Belgique, empêtrée depuis des années dans une vraie-fausse guerre de sécession : «Je n’accepte plus ce western qui oppose des cowboys et des Indiens avec, au milieu d’eux, le bâtard qu’est Bruxelles. Il faut arrêter cette guerre entre deux peuples et ces discussions frontalières. Nous devons nous rendre dignes d’héberger l’Europe et d’en être la capitale. Jusqu’à présent, c’est tout l’inverse que nous avons fait !»

L’an dernier, Rudy Aernoudt a fondé LiDé, parti libéral démocrate, qu’il préside. “Li” comme libéral, qui croit au bons sens et à l’initiative («ce qui n’a rien à voir avec le libéralisme»), et “Dé” comme démocrate, «qui écoute les gens ». Et “l’idée”, car, « comme disait Victor Hugo, rien n´arrête une idée dont le temps est venu !»

Ce n’est pas pour rien que Rudy a fait cinq années d’études philosophiques : « Je suis un idéaliste qui veut que les choses bougent. Les circonstances m’ont mis sur une carte où je peux avoir un impact. Étant professeur d’économie à temps plein, j’ai les mains libres pour ma tâche ».
Et il y a du travail ! « Tel qu’il fonctionne aujourd’hui, le système étouffe l’initiative. Le pays compte 500 000 chômeurs. 40 % d’entre eux gagnent plus en touchant leurs allocations que s’ils travaillaient. La Belgique est le seul pays au monde où l’on peut être chômeur toute sa vie. Il y a des gens qui ont été indemnisés pendant 40 ans et qui prennent leur retraite sans passer par la case “emploi”. Une étude universitaire a révélé que, en équivalent temps plein, 300 000 personnes travaillent au noir. Dans le même temps, des entreprises cherchent des salariés qu’ils ne trouvent pas… Il faut redonner l’envie de travailler en réformant le système. On pourrait déjà limiter la durée de l’indemnisation du chômage à trois ans. »

Autre combat de Rudy Aernoudt, celui mené contre « le virus de la corruption et du clientélisme » : « Toutes les semaines, un nouveau scandale sort.  Il n’y a pas assez de rotation dans les instances politiques. Ce sont les mêmes qui occupent longtemps les postes. On compte 5 000 personnes dans les cabinets ministériels. Le système favorise le copinage. Beaucoup de logements sociaux sont occupés par des personnes appartenant à des partis politiques, alors que 17 % des gens vivent sous le seuil de pauvreté et n’accèdent pas facilement au logement social. Devant ce constat, on peut comprendre que les Belges n’ont plus le goût de faire des efforts. Et que les Flamands protestent : ils ne veulent plus que les transferts aux Wallons (plusieurs milliards d’euros par an) servent à remplir les poches des politiciens corrompus ».

« J’ai commencé par faire le ménage en Flandre »

Rudy a un bon argument : avant de venir prôner la bonne gouvernance en Wallonie, il a mené ce combat en Flandre. En 2007, il avait été licencié de son poste de secrétaire-général du département économie, science et innovation du gouvernement flamand pour avoir dénoncé des affaires de corruption dans l’administration. Il avait notamment déposé une plainte pour des irrégularités à propos de certaines études au cabinet de la ministre Mme Moerman… dont il était le chef de cabinet et qui a dû démissionner par la suite! Il avait également publié, en 2003, «Corruption à foison : Regards sur un phénomène tentaculaire», L’Harmattan.

En s’attaquant à la corruption, le politicien «enlève les arguments des séparatistes flamands. En Flandre, le gouvernement a été contraint de prendre des mesures : les cabinets ministériels ne peuvent plus désormais attribuer directement les contrats. Ceux-ci doivent passer par un jury indépendant. J’ai donc commencé par chez moi avant de venir en Wallonie faire le même ménage».

De même, « il faut arrêter d’envoyer à l’Union européenne les personnes qu’on veut remercier ou dont on veut se débarrasser. Nous devrions plutôt choisir de très bons éléments. Et pas des vieux de 75 ans, mais des jeunes qui ont envie de changer les choses ! »
Parmi les autres priorités de LiDé, la réforme du système éducatif et celle de la fiscalité : « Avec 6 000 € par an de revenu, les Belges sont taxés à 30 %. Nous voulons qu’ils soient exonérés jusqu’à 12 500 € de revenu, puis taxés à 19 % au-delà ».

Politiquement, LiDé se sent proche des Verts écolos et du Mouvement réformateur (centre-droit), même si ce dernier est « moins radical » que LiDé.

Enfin, Rudy Aernoudt suggère que la Belgique et la France, « qui se ressemblent beaucoup, surtout par leurs faiblesses », entreprennent plus ensemble. Par exemple, pourquoi ne pas créer une plateforme économique commune entre Courtrai, Mouscron, Tournai et la région lilloise ? Pourquoi ne pas mettre en œuvre un pôle commun de compétitivité dans l’agroalimentaire ou dans l’aéronautique, points forts dans les deux pays ?

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