Ruralité et gestion verte

Expérience Biovallée : voyage en territoire durable

INTERVIEW Avec le plus fort taux de terres en agriculture biologique (26% contre 2,5% en moyenne en France) la Biovallée, et sa centaine de communes, se veut un territoire de référence en matière de développement durable. Située dans la Drôme, elle accueillera du 26 au 28 septembre les deuxièmes rencontres nationales « Energie et territoires ruraux » (Tepos). Interview de Philippe Méjean, chef de projet Biovallée, qui détaille les actions coordonnées depuis dix ans en faveur d'une gestion durable du bien commun.

Biovallée

Photo Noak Carrau, Communauté des communes du Diois.

Ouvertures. A l’occasion des deuxièmes rencontres nationales « Énergie et Territoires ruraux », la Biovallée présentera un objectif ambitieux en matière de production d’énergies renouvelables : dès 2020, vous souhaitez couvrir les consommations énergétiques des ménages (hors transport). Mais peut-on vraiment couvrir tout un territoire, pas seulement un quartier, avec les énergies alternatives ?

Philippe Méjean, chef de projet Biovallée

Philippe Méjean, chef de projet Biovallée.

Philippe Méjean. C’est tout à fait possible mais l’idée n’est pas de régler définitivement la question par l’implantation de cinq ou six grands parcs d’éoliennes, ce qui serait en soi largement suffisant pour y parvenir. Nous souhaitons d’abord procéder à des économies d’énergie afin de diminuer la facture des ménages. Biovallée a par exemple lancé l’opération DORéMi (dispositif opérationnel de rénovation de la maison individuelle) en proposant aux particuliers de concevoir la rénovation énergétique de leur maison. Les artisans locaux sont invités à se fédérer pour proposer une offre groupée; Biovallée les aide à se former pour que leurs prestations soient optimales. L’objectif est de réaliser dix chantiers pilotes sur le territoire Biovallée pour diviser par quatre en moyenne les consommation d’énergie. Mais aussi de diminuer par deux les coûts de rénovation de l’habitat privé pour la rendre accessible au plus grand nombre.

Parallèlement, vous voulez devenir un territoire produisant plus d’énergie qu’il n’en consomme ?

carte de la Biovallée

↑ Fiche d’identité et historique de Biovallée : cliquez sur l’image.

Dès 2020, grâce au développement des énergies renouvelables sur notre territoire, nous espérons couvrir la consommation des ménages par une production équivalente en énergies alternatives diversifiées (aussi bien en taille qu’en type d’énergie). A l’horizon 2040, nous visons une production énergétique verte égale à 100% de nos besoins totaux : ménages, transports, activités économiques. Devenir un territoire à énergie positive, tel est l’objectif à terme que nous partageons au sein du réseau Tepos.

Deuxièmes rencontres Énergie & territoires ruraux

Biovallée et le jeune réseau « TEPOS » des Territoires à Énergie Positive souhaitent faire entendre la voix de la ruralité dans le grand débat national sur la transition énergétique.
Pendant trois jours, du 26 au 28 septembre 2012, les rencontres nationales Énergie & territoires ruraux accueilleront pas moins de 400 élus, experts et citoyens.
Les participants proposeront de mutualiser leurs compétences pour couvrir les besoins énergétiques des territoires ruraux par les énergies renouvelables. Dans le cadre d’ateliers, ils formuleront des propositions.
Delphine Batho, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie est invitée à conclure cet événement.
Info pratiques : www.biovallee.fr

Biovallée, c’est un territoire rural où la voiture s’avère indispensable… quelles parades a-t-on imaginées et mises en place dans la logique des économies d’énergie ?

la motte-chalancon

La Motte-Chalancon, un petit chef-lieu de canton. Photo Noak Carrau, Communauté des communes du Diois.

Les déplacements représentent un tiers de notre consommation énergétique. On ne pourra pas, en effet, se passer la voiture dans certaines zones reculées. Mais développer des solutions économes reste à notre portée autour de l’axe principal de la vallée : grâce à internet et au co-voiturage de proximité (le site web du département de la Drôme est lancé cette semaine), grâce à des animations pour faire connaître ces solutions au grand public, grâce aussi à la mise en place d’aires de stationnement spécialement dédiées, à l’optimisation des transports collectifs, au développement de la fibre optique pour le télétravail ou pour économiser un certain nombre de déplacements.

Comment cette question des transports est-elle prise en compte dans votre réflexion sur l’aménagement du territoire ?

ecosite val de drôme à Eurre

L’écosite du Val de Drôme, à Eurre, ouvre ses portes les 28 et 29 septembre prochain.

Nous essayons de développer l’emploi en tenant compte de l’accès de proximité aux services et à l’habitat. Une manière aussi de préserver nos espaces agricoles et naturels. Un premier écosite, à Eurre, a été aménagé, trois autres sont en cours à Die, Livron et Loriol. Un cinquième écoparc d’activités est en projet à Aouste. Nous essayons par ailleurs de pousser aussi loin que possible l’excellence environnementale de ces parcs dans leur gestion quotidienne : proximité de bourgs centres et des gares, services aux salariés (restauration bio et/ou locale, paniers d’Amap…), aux entreprises (gestion mutualisée des déchets, gardiennage, conciergerie d’entreprise…). Un système de management environnemental type ISO 14 000 sera mis en place.

Comment les habitants prennent-ils part au projet Biovallée ?

Comme le dit Jean Serret, président du comité de pilotage, Biovallée existe aujourd’hui du fait du nombre d’initiatives individuelles et collectives réussies en matière de développement durable. Le territoire était déjà leader en agriculture biologique, grâce à des pionniers qui avaient fait ici ce pari dès les années 70. Le mérite leur revient. Idem sur les énergies renouvelables, avec trois fois plus de particuliers qui sont équipés, par rapport à la moyenne régionale.

biovallée agriculture bio

Photo Noak Carrau, Communauté des communes du Diois.

Les citoyens et les entreprises restent étroitement associés aux phases d’élaboration de nos divers projets (réunions publiques, forums, réunions de travail avec les conseils locaux de développement…). Toute structure peut s’approprier la marque Biovallée®, dans la mesure où une partie des mesures de la charte sont mises en œuvre. Biovallée n’est pas une marque exclusive, mais inclusive. Toute action nouvelle allant dans le sens de la charte peut y être ajoutée et donner droit à l’utilisation de cette marque qui n’est pas figée.

Sur la base du volontariat, chacun est amené à « faire sa part », dans la mesure de ses possibilités et avec un rythme adapté. Enfin, dans la communication au quotidien, nous nous appuyons bien sûr sur de nombreux relais de la société civile qui croient en cette démarche.

Biovallée, ce sont aussi et surtout des élus qui ont cru et financé le projet. Au-delà des clivages politiques ?

Jean Serret biovallée

Jean Serret, président de la communauté du Val de Drôme et du comité de pilotage de Biovallée.

Des communes de différents bords politiques se retrouvent dans le projet autour de la gestion durable du bien commun. L’expérience Biovallée s’inscrit au-delà des couleurs et montre que sur un certain nombre de questions les clivages peuvent être dépassés. Nos projets trouvent des financements sur leurs lignes de crédits générales auprès de l’État, de l’Europe et du département. La Région a multiplié par trois son soutien financier pour nos contrats de territoire. Le projet Biovallée fait partie des sept Grands Projets Rhône-Alpes (GRPA). Elle y consacre 10 millions d’euros entre 2009 et 2014.

Pour aller plus loin :

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1 commentaire pour cet article

  1. Etre un territoire à énergie positive, c’est à dire produire plus d’énergie que l’on en consomme ne signifie pas, contrairement aux apparences, être autonome en énergie !

    A moins de trouver des solutions de stockage de l’électricité, le caractère résolument intermittent de l’éolien et du solaire fait qu’il n’est pas possible de couvrir les besoins à tout moment, même si on les couvre au global sur une année.