Bâle : le retour du saumon sauvage

Le 5 octobre 2008, un pêcheur bâlois (Suisse) a sorti un saumon sauvage des eaux du Rhin. L’association Alsace Nature qualifie cet événement d’historique.


Crédit : André/Shnd.

«C’est le retour après 50 années d’absence du saumon sauvage dans les eaux du Rhin suisse», explique l’association de défense de la nature dans un communiqué. Un pêcheur a accidentellement accroché un saumon d´une taille de 91 cm près de l’embouchure de Birse, non loin de Bâle. Introduit dans un affluent du Haut-Rhin au stade d´alevin en 2005 ou 2006, le poisson, une femelle formellement identifiée par des experts, a grandi dans l´Atlantique puis est remonté par la Mer du Nord et le Rhin, jusqu´à sa rivière d´origine pour y frayer. Il a été soigneusement relâché puisque sa pêche, ainsi que celle de la truite de mer, est formellement interdite.
Nul ne sait comment il a réussi à remonter le Rhin en l’absence de dispositifs techniques adéquats. Il a dû emprunter les écluses de navigation, ce qui, selon l’association, relève du miracle.

Cet événement réjouit la Commission internationale pour la protection du Rhin (CIPR) dont le principal objectif est précisément de refaire du Rhin un fleuve salmonicole. Un programme “Saumon 2000” avait été lancé en 1987 : le retour du saumon devait être le symbole grand public de la reconquête de la qualité chimique des eaux. Grâce aux efforts des États riverains du Rhin (Suisse, France, Allemagne, Luxembourg et Pays-Bas), la qualité de l´eau et des habitats aquatiques s´est donc considérablement améliorée.

En octobre 2007, un plan directeur “Poissons migrateurs” a été élaboré (décision à venir à l´été 2009) pour lancer la construction d´une passe à poissons à Strasbourg et des équipements en amont pour permettre aux migrateurs d´accéder librement au bassin allemand Eltz-Dreisam à hauteur de Fribourg, tout ceci avant 2015. Jean-Louis Borloo, ministre de l’écologie, a écrit au président d´EDF pour l’enjoindre d’engager ces travaux. Globalement, 50 millions d´euros ont déjà été dépensés pour améliorer la circulation du mythique poisson jusqu´aux frayères suisses. 160 M€ sont encore envisagés.

Peu à peu, depuis la prise de conscience qui a suivi l´accident Sandoz qui avait gravement pollué le fleuve, toutes les espèces de poisson jadis présentes dans le Rhin, sauf l´esturgeon d´Europe, sont de retour. Des peuplements de lamproies marines se reconstituent progressivement. Ces espèces n´étant pas soutenues par des alevinages, c´est bien la nature qui, spontanément, corrige les dégradations anthropiques.

Reste que, malgré tous les efforts déployés depuis 20 ans, les peuplements de migrateurs ne sont pas encore, eux, en équilibre naturel.

« Les artistes-interprètes sont aujourd’hui méprisés »

Philippe Ogouz, comédien et président de l’Adami (voir encadré), est en colère. Il ne supporte plus de voir de grands comédiens, comme Jean-Pierre Léaud, par exemple, ou de bons musiciens, survivre à peine avec un salaire inférieur au smic ou une retraite de misère. La société doit se ressaisir et reconnaître aux artistes-interprètes le simple droit de vivre de leur travail.


Philippe Ogouz
Crédit : Thomas Bartel

La France ne reconnaît pas suffisamment les droits des artistes-interprètes. Moins bien lotis que les artistes auteurs ou compositeurs, les artistes-interprètes vivent de plus en plus dans un état de pauvreté, voire dans la misère. D’après Philippe Ogouz, président de l’Adami, les comédiens, par exemple gagnent en moyenne moins de 8 000 € par an. Ils doivent alors compléter ce revenu par des petits boulots alimentaires, loin de leur métier, pour survivre. Le chômage touche une grande majorité d’entre eux.

Sur les 23 000 adhérents de la société de répartition (voir encadré), 7000 n’ont touché aucun droit en 2008. Tous les mois, quatre à cinq anciens artistes sollicitent la solidarité de l’Adami pour continuer à exister.

A un acteur qui cherche un appartement, on reproche d’avoir des employeurs multiples. On lui demande une, deux, jusqu’à quatre cautions pour rassurer le bailleur. Certains comédiens ont la chance de faire partie d’une troupe, comme au Français ou dans quelques théâtres publics de province. Mais ces situations sont de plus en plus rares.

« Auparavant, explique Philippe Ogouz, un téléfilm nécessitait 30 jours de tournage. Puis on est passé à 28 jours, 26 et aujourd’hui une vingtaine. Les cadences augmentent dans nos métiers aussi. Il faut faire plus en moins de temps. Les textes aussi raccourcissent en durée et on diminue le nombre de rôles : il faut que tout soit rentable. Même chose pour le théâtre. Avant, on pouvait avoir dix acteurs sur scène. Maintenant, il ne faut pas que ça dépasse 3 ou 4 comédiens. »

Quant aux retraités, beaucoup doivent se contenter de 400 € par mois !

Qu’est-ce que l’Adami ?

L’Adami est une société de gestion collective des droits de propriété intellectuelle des artistes-interprètes. Gérée par et pour les artistes depuis plus de 50 ans, elle perçoit et répartit les droits de 100 000 comédiens, chanteurs, musiciens, chefs d’orchestre et danseurs, dont plus de 23 000 adhérents, pour l’utilisation de leur travail enregistré.

Également, elle soutient la création artistique (13 millions d’euros dépensés en 2008 pour aider différents spectacles) pour favoriser l´emploi des artistes. Enfin, elle défend les droits des artistes-interprètes à l´échelle nationale et internationale.

La faiblesse particulière du métier d’artiste-interprète tient, selon M. Ogouz, à plusieurs choses. D’abord, il y a un « mépris » pour cette activité : « Il n’y a pas si longtemps, les comédiennes étaient appelées des “cocottes”… Nous ne sommes pas comme les buralistes, les chauffeurs de taxi ou les agriculteurs, à qui il suffit de manifester un peu bruyamment dans la rue pour obtenir gain de cause ».

En outre, le métier est peu syndiqué, à la différence des États-Unis, par exemple, où l’affiliation à un syndicat est obligatoire. Ce qui a permis aux scénaristes, récemment, de faire accepter leurs revendications après trois mois de grève.

Serge Gainsbourg au Gala
de l’Union des artistes.
Crédit : Daniel Lebée.

Philippe Ogouz déplore que les pouvoirs publics, et notamment le ministère de la culture, se désintéressent du sort de ces artistes : « M. Sarkozy a épousé une artiste, mais ça ne change pas grand-chose pour la profession, bien que Carla soit membre de l’Adami… Je compte relancer le Gala de l’Union, ce spectacle qui réunit les artistes pour une soirée de cirque avec la télévision. J’espère que le président de la République sera sensible à ce projet et voudra bien le patronner ».

Mais la grande question, pour améliorer la situation des artistes-interprètes, est celle des droits sur internet : « Nous réclamons simplement notre dû, c’est-à-dire quelques euros sur les œuvres téléchargées. Pourquoi les artistes-interprètes seuls ne seraient pas payés pour leur travail ? On ne parle plus de la “licence globale”, mais il faudra bien, un jour ou l’autre, qu’un pourcentage sur les téléchargements soit prélevé et distribué à ceux sans qui ces œuvres n’existeraient pas ».

Développement durable : les banques font des efforts…

De plus en plus de banques affichent des engagements en matière de développement durable (DD). Efforts réels ou greenwashing (blanchiment écologique) ? Cet affichage d’un engagement vert (qui vient bien tardivement) démontre en tout cas qu’elles ne peuvent plus décemment s’exonérer de leur responsabilité. Exemples.

banquesCrédit Coopératif – Le Crédit Coopératif investit dans l´économie et la finance solidaires. Il a été désigné leader en 2007 par le 5ème baromètre des finances solidaires (Finansol-La Croix-Ipsos). En 2007, il est entré dans une démarche d´achats écologiques, de compensation carbone de ses réunions et assemblées générales régionales. Il met en œuvre progressivement de nouvelles exigences durables dans la rénovation de son patrimoine immobilier.

Barclays – Le cabinet Corporate Citizenship note des progrès réalisés par Barclays en matière d’évaluation sociale et environnementale des choix d´investissements. La banque britannique s´était engagée en 2003 en cofondant les Principes de l´Équateur, qui imposent une modification dans le processus d´octroi des financements sur la base de critères de développement durable, pour tout projet supérieur à 10 millions de dollars. En 2007, l´ensemble des activités européennes du groupe étaient neutres en carbone, avec pour objectif de généraliser cette démarche à l´ensemble des activités d´ici à 2009. Depuis avril 2007, 50% de la consommation d´électricité de Barclays en Grande-Bretagne provenaient de sources d´énergie renouvelables et 173 000 tonnes de CO2 ont été compensées.

Crédit Mutuel – Le troisième rapport sur la responsabilité sociale et environnementale (RSE) du groupe rend compte de l’approche pédagogique mise en œuvre en 2007 : des films régionaux et un film national, 40 000 synthèses du rapport RSE distribuées lors des 2 000 assemblées générales de caisses locales, un rapport RSE national et des rapports RSE régionaux. De nouveaux partenariats avec des associations ont été signés pour favoriser l´inclusion bancaire. Certaines Fédérations ont souhaité mesurer les impacts liés à leurs activités en réalisant notamment un bilan carbone ou un bilan sociétal. Au total, le Crédit Mutuel est associé à 140 plateformes d´initiative locale (Pfil) de France Initiative. Des lignes de crédit ont été ouvertes à l´Adie (Association pour le droit à l´initiative économique) pour près de 3,8 millions d´euros, et plus de 1 200 prêts effectués par l´Adie ont été cofinancés. Globalement, 16,5 M€ ont été versés à des associations et plus de 600 M€ ont été consacrés au microcrédit professionnel en 2007.

BNP Paribas – Dans une optique de développement durable, BNP Paribas a fait appel à Green Cove Ingénierie pour mettre en œuvre un service de covoiturage dédié pour des salariés. En se connectant sur ecovoiturage.pro, ceux-ci peuvent proposer des places disponibles dans leur véhicule et prendre contact pour covoiturer. Le site permet également d’évaluer la distance et les frais engagés par le trajet ainsi que les émissions de CO2 générées par les déplacements.
Une première étape, concluante, avait démarré fin 2007 avec BNP Paribas Assurance. BNP Paribas a décidé d’étendre ce service à l’ensemble de ses collaborateurs en France. Créée en 2003, la société Green Cove Ingénierie exploite également le premier site de covoiturage en France : 123envoiture.com.

Dexia – « Acteur de long terme au service de l´intérêt général », Dexia a été récompensée en 2007 pour ses efforts réalisés dans le domaine de l´investissement socialement responsable (ISR) et des énergies renouvelables : avec près de 9 % de parts de marché, l´entreprise franco-belge se positionne aujourd´hui comme l´un des premiers financeurs de projets dans ce secteur, en particulier dans l´éolien. En 2007, Dexia a participé au financement de 26 projets éoliens dans 11 pays. A la fin de l’année, Dexia Asset Management gérait 110 milliards d´actifs, dont 17,6 milliards d´euros d´encours en fonds et mandats ISR (qui représente 16 % de la totalité de ses actifs sous gestion. Dexia a mis en place une stratégie carbone complète (échanges de quotas de CO2) pour ses clients. Elle propose le premier crédit au monde permettant à une collectivité locale d´annuler ses émissions directes de CO2.

En Turquie : un geste éthique

Première historique : les agences de crédit à l’exportation allemande, autrichienne et suisse se retirent officiellement du projet de barrage d’Ilisu en Turquie. Motif : la Turquie ne respecte pas les conditions sociales, culturelles et environnementales auxquelles elle s’était engagée. L’ouvrage géant, planifié sur le Tigre, menace de conduire au déplacement de dizaines de milliers de personnes (principalement des Kurdes) et de noyer un patrimoine culturel unique au monde. « C’est maintenant au tour de la Société Générale d’en tirer les conséquences et de se retirer immédiatement de ce projet inacceptable », déclarent les Amis de la Terre.

« Environnement : Comment choisir ma banque ? »

Les Amis de la Terre publient la version 2008-2009 de leur guide éco-citoyen «Comment choisir ma banque ?», en partenariat avec la CLCV, l´une des plus importantes associations françaises de consommateurs et d´usagers. L’association a analysé les impacts environnementaux et sociaux des différentes activités des grandes banques françaises afin d’informer les citoyens de l’utilisation qui est faite de l’argent qu’ils confient à leur banque, et les pousser à modifier leurs pratiques. Le guide révèle dans son classement trois groupes de banques distincts : la Nef et le Crédit Coopératif aux impacts positifs, la Banque Postale, la Banque Populaire, la Caisse d’Epargne et le Crédit Mutuel-CIC aux risques faibles à modérés, et le Crédit Agricole, la Société Générale et BNP Paribas, qui s’avèrent les plus risquées et pour lesquelles les Amis de la Terre formulent des recommandations précises.

Maputo : de petits opérateurs montent un service alternatif

Dans la banlieue mal desservie en eau de Maputo, au Mozambique, des petits opérateurs privés (POP) indépendants fournissent un service alternatif et innovant à plus de 200 000 habitants. Fonctionnant sans autorisation, ils pourraient, à terme, intégrer le service de l’eau.


 

 

 

Un modèle technique original et très compétitif : des réservoirs modulaires sur structure métallique ou en béton armé, qui permettent des coûts d’investissement et de fonctionnement réduits.

  Crédit : Emmanuel Chaponnière, Hydroconseil

A côté des grandes compagnies et des systèmes conventionnels de distribution d’eau peuvent exister des démarches plus souples, moins coûteuses et plus adaptées à la situation des agglomérations des pays en développement. Exemple à Maputo. Dans les quartiers périphériques de la capitale du Mozambique, qui accueillent la majorité de la population, l’organisation urbaine et la couverture en services publics sont assez faibles, notamment en ce qui concerne l´eau et les transports.

L´approvisionnement en eau de la ville est en partie assuré par un réseau dont les infrastructures sont la propriété de l´État qui en a délégué la gestion à une société de patrimoine (qui détient les infrastructures), le Fipag. L´exploitation des infrastructures est déléguée à un opérateur international, Aguas de Moçambique (AdeM) qui détient 35 % du marché de l´eau dans l´agglomération. On estime qu’environ un quart de la population s’approvisionne en eau potable à travers la revente de voisinage des abonnés d´AdeM, mais aussi à partir de connexions clandestines au réseau.

Une forme de reconnaissance officielle

Aujourd’hui, les POP sont partie prenante d’un projet financé par la Banque européenne d’investissement, l’Union européenne, l´Agence française de développement (AFD) et la coopération hollandaise. Ce projet est mis en œuvre par le Fipag (société de patrimoine) avec l´assistance technique d´Hydroconseil.

Trois axes de développement sont poursuivis :

  • la reconnaissance formelle de l´activité des POP au moyen d´une licence de distribution d´eau potable. Cette licence crée un premier cadre « léger » de régulation. Pour l´instant, le seul critère technique retenu pour l´obtenir est la qualité de l´eau distribuée;
  • l´augmentation du niveau de couverture des POP existants : une subvention indexée sur les résultats est mise en place. Elle permet à l´opérateur d´augmenter sa clientèle tout en connectant les usagers les plus défavorisés ;
  • la mise en place d´infrastructures dans les zones faiblement desservies : ces infrastructures sont propriété du Fipag  mais reposent sur les mêmes principes que les systèmes construits par les POP (forage, château d´eau et réseau). Leur gestion est déléguée à des POP sélectionnés sur la base d´un appel d´offres.

Le Fipag profite de cette dynamique initiale pour développer lui aussi le service de l´eau dans les zones périurbaines en s´inspirant directement du modèle développé par les POP. Pour ces derniers, c’est une forme de reconnaissance de leur contribution importante au service de l´eau dans l´agglomération.

Peu à peu, d´autres opérateurs, indépendants, se sont développés, principalement dans les quartiers périurbains les moins bien desservis. Ces petits opérateurs privés, les POP, relèvent du secteur informel (non reconnu officiellement). 450 POP recensés à Maputo distribuent une eau produite par des forages à 38 000 foyers environ et 320 bornes-fontaines. Leur part de marché atteint également 25%. Le reste de la population s´approvisionne en eau à partir de puits ou de forages privés. Selon Emmanuel Chaponnière, de la société Hydroconseil, ces petits opérateurs disposent de leurs propres forages, sont indépendants de l´opérateur dominant et fonctionnent sans autorisation.

Leurs infrastructures vont du système modeste (forage + pompe alimentant un château + distribution par gravité) au système plus sophistiqué (+ pompe pour garantir la pression minimale dans le réseau). Pour la distribution, certains POP proposent la “connexion spaghetti” : le client fournit le matériel nécessaire à la connexion au château d’eau et supporte le coût des fuites éventuelles. Il est donc responsabilisé pour vérifier et informer l’opérateur. D’autres opérateurs livrent la connexion chez le client où est installé un compteur, comme sur le réseau officiel.

Un modèle technique original

Les POP de Maputo ont progressivement mis au point un modèle technique original, éprouvé par l´expérience. C’est un modèle modulaire, qui permet d’agrandir le réseau en suivant très précisément l´accroissement de la demande. Il permet aussi de réduire au minimum les coûts d´investissement et de fonctionnement. Il est donc très compétitif. Les POP investissent entre  8 000 $ et 20 000 $ dans un système (production, stockage et distribution), sans aucune subvention publique.

Beaucoup parmi les POP avaient une expérience dans le secteur minier en Afrique du Sud, qui leur a permis d´acquérir un bagage technique minimal (plomberie, électricité). Revenus au Mozambique pour leur retraite, ils disposaient d´économies qu´ils ont investies. Ils ont acheté un terrain dans la périphérie de Maputo, dans des zones d´expansion qu´ils ont ensuite équipées d´un forage pour accéder à l´eau. En principe, l´investissement initial n´est pas réalisé dans un but lucratif. Mais comme un forage produit plus d´eau que nécessaire pour une famille et que la demande du voisinage est forte, les POP ont saisi l´opportunité de marché qui s´offrait à eux…

(Source pS-Eau)

Livres : notre sélection du 1er trimestre 2009

Avec l’argument imparable « C’est pour mieux vous guérir ! », les chercheurs sont engagés dans une course folle pour maîtriser nos gènes et notre système reproductif, visant leur domestication complète. Certains en redemandent. Beaucoup s’en effraient. Quoi qu’il en soit, il est temps de nous préparer à ce futur proche quasi certain : l’homme sera un jour cloné.

La fabrique de l’Homme
Laurent Ségalat
Bourin éditeur

Dix ans après la naissance de la brebis Dolly, le clonage reproductif effraie autant qu’il fascine. Car, s’il venait à se réaliser, le clonage humain, plus qu’une simple prouesse technique, créerait une révolution. Pour l’auteur, la probabilité de voir un homme cloné au cours du XXIe siècle est très élevée : « Il est probable que d’ici à quelques décennies, on aura la possibilité de choisir à l’avance le physique de ses enfants sur un catalogue, comme on choisit aujourd’hui ses rosiers : “Garçon, type suédois, blond, yeux bleus, visage rond, 1,80 m environ, athlétique, bonne santé” ; “Fille, type italien, brune, yeux en amande, large bouche, fossettes demeurant à l’âge adulte, 1,65 m environ, mince, légère myopie, parfaite santé et fécondité” ».

Laurent Ségalat, généticien, directeur de recherches au CNRS, ne s’inquiète pas de ces évolutions. Au contraire, il déplore les freins au clonage tels qu’ils ont été décidés en France et s’efforce de désamorcer, de façon non dépourvue d’intelligence, les arguments qui s’opposent à ces manipulations, comme la crainte de l’eugénisme souvent associé au clonage. M. Ségalat en démontre l’hypocrisie : une sélection est en fait déjà largement pratiquée dans notre société avec le diagnostic préimplantatoire, l’amniocentèse, l’échographie prénatale et la conservation des œufs et du sperme, conservation qui élimine les donneurs aux chromosomes anormaux ou venant d’individus jugés peu fiables. Et le clonage reproductif humain n’est pas de l’eugénisme puisqu’il vise à reproduire à l’identique des individus existants.

Bref, il ne suffit pas d’avoir fait une loi pour interdire en France une technologie qui verra probablement bientôt le jour ailleurs dans le monde. Selon l´auteur, il faut en rediscuter.

Main basse sur le génome
Frédéric Dardel et Renaud Leblond
Anne Carrière

Partant de l’incroyable histoire de Craig Venter, surnommé le « sorcier du génome », scientifique génial et businessman hors pair qui s’est donné pour objectif d’être le premier à recréer la vie de manière synthétique, les auteurs font une plongée dans les secrets de notre intimité génétique : nos gènes, leur nombre, leur forme, leur rôle. Ils racontent les prouesses technologiques et informatiques qui ont permis de décrypter l’ADN et nous font entrer dans le cercle très fermé de la communauté scientifique internationale – un monde qui se dénigre, se jalouse, se déchire, en raison d’enjeux scientifiques et politiques vertigineux.

Enfin, ils s’interrogent sur le champ des possibles ouvert par ces nouvelles connaissances, où le pire côtoie le meilleur.

Les auteurs : Frédéric Dardel, docteur en biologie moléculaire et professeur à la faculté de pharmacie de Paris, et Renaud Leblond, directeur de la fondation Jean-Luc Lagardère.

Les pauvres remboursent toujours
Le microcrédit à la Grameen Bank
Asif Dowla et Dipal Barua
Préface de Muhammad Yunus, Prix Nobel de la Paix en 2006
Yves Michel

Ce livre retrace l’histoire de la Grameen Bank de deuxième génération, version améliorée et plus souple du désormais célèbre modèle Grameen. A l’origine consacré à un prêt pour la création d’activité économique, le modèle s’ouvre désormais aux particuliers (achat de voiture par exemple).

La Grameen Bank est la première banque à avoir accordé des prêts aux pauvres, et plus précisément des microcrédits. Cette pratique a permis à un grand nombre de personnes, en majorité des femmes, de trouver une autonomie dans leur activité professionnelle. C’est ce qui a valu le Prix Nobel de la Paix en 2006 à son fondateur Muhammad Yunus, qui avait fait le pari que la microfinance sortirait les plus démunis de la pauvreté.

Le système a en effet été confronté à ses propres limites lors des inondations qui ont ravagé le Bangladesh en 1998 : le système nécessitait un assouplissement et une réorganisation pour s’adapter aux besoins des plus pauvres.

Écrit par deux anciens étudiants de Yunus, ce livre retrace l’histoire de la Grameen Bank de deuxième génération, version améliorée et plus souple du désormais célèbre modèle Grameen.

WordPress
Toutes les clés pour créer, maintenir et faire évoluer votre blog
par Amaury Balmer, Xavier Borderie et Francis Chouquet
Pearson

Vous êtes actif, vous avez des idées à partager, des coups de gueule à donner, vous ne pouvez plus aujourd’hui faire l’économie d’un blog.
WordPress est une des plates-formes de publication personnelle les plus utilisées. Son système de gestion de contenus (CMS) est gratuit et open-source. Faisant tourner près de 6 millions de sites web, c’est l´un des outils de blog actuellement les plus populaires.

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– “Vademecum de l´eau” Editions Johanet
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– “Les Droits de l´âme ; pour une reconnaissance politique de la transcendance” – L´Harmattan.
Plus d´info sur jlml.fr, rubrique “Mes livres”.

Cheval dire à ton maire !

De plus en plus de municipalités font appel au cheval pour toute une palette de tâches effectuées jusqu’alors par des engins mécaniques ou avec des objectifs nouveaux : tri et ramassage des ordures ménagères, débardage, arrosage des corbeilles municipales, tonte des parcs, nettoyage des forêts, écopâturage, hersage des pistes cavalières, insertion de personnes en difficulté, patrouille de sécurité, transport de touristes en calèches, transport scolaire et même… équithérapie.


Tonte de gazon sans fuel !
Crédit : Equiterra

Les chevaux peuvent être employés pour répondre à de nombreux besoins des collectivités locales. Une centaine de villes en France font aujourd’hui travailler des équidés. Ces villes ont même leur congrès, dont la 6e édition s’est déroulée en octobre 2008 à Trouville-sur-Mer (Calvados).

Pour la ville organisatrice de l’événement, il s’agit de « ramener du vivant dans la ville », selon le mot d’Ambroise Dupont, président au Sénat du groupe « cheval » et vice-président du conseil général en charge des Equiday’s, une manifestation hippique à laquelle la municipalité participe.

Le cheval n’est pas un gadget : « La difficulté, explique Olivier Linot, directeur général des services de la mairie de Trouville-sur-mer, c’est encore de faire comprendre qu’il ne s’agit pas d’une activité ludique et bucolique mais d’une vraie opportunité sur le plan écologique, bien sûr, mais aussi sur les plans technique, professionnel et social ».

Lyon : collecte hippomobile


Collecte de verre.
Crédit photo : Equiterra.

La ville de Lyon a mis en place une équipe de collecte hippomobile, en 2005, pour le ramassage des corbeilles dans le Parc de la Tête d’Or. Sylvie Sagne, qui travaille au service espaces verts, raconte que « l’équipe a pris la décision d’entrer dans un projet environnemental avec un outil de management au service de la gestion durable qui s’appelle la certification ISO 14001. Cela sert à réduire l’ensemble des impacts de toutes nos activités espaces verts sur l’environnement. Notre projet de traction animale s’est inséré naturellement puisque nous avions déjà ce projet de services au sein de la ville. Résultats : diminution du bruit et de l’émission de gaz à effet de serre, bonne intégration de l’attelage dans un cadre historique, renforcement du lien social entre les usagers et les agents de la ville, revalorisation du travail de ces mêmes agents et maîtrise des coûts d’investissement par l’économie d’un camion benne. Le cheval contribue aussi à la protection des sols (contrairement au tracteur) et au respect de la biodiversité ».

Nyon (Suisse) : accompagnement social et équithérapie

Marco Mora, membre de la Fondation officielle de la jeunesse à la ville de Nyon (Suisse) raconte que « la fondation aide à l’accompagnement éducatif d’enfants, d’adolescents et jeunes adultes, placés par les services sociaux dans des institutions à Genève. L’atelier-classe et traction animale est un externat pédago-éducatif qui peut accueillir des jeunes ayant vécu des difficultés sociales ou psychologiques importantes ».

Avec les chevaux (deux chevaux et une ânesse), l’atelier assure le ramassage des déchets verts au domaine des Ormeaux, l’entretien des parcs de la Fondation FOJ, le tri des déchets et le ramassage des poubelles sur le site, le débardage et le nettoyage de petites forêts privées aux alentours de Genève et des animations diverses pour les villes avoisinantes.

« Nous avons collaboré au Paleo 2008, un festival européen qui reçoit 350 000 personnes, continue M. Mora. On nous a demandé de ramasser les toilettes sèches et les poubelles. On était hébergé sur l’alpage de Potraux, car pour préserver l’approche de la nature et l’idée de développement durable avec les jeunes, on part tout l’été avec eux vivre dans l’alpage. On a le projet, au niveau touristique  de faire une boucle d’environ 5 km (un circuit de quatre châteaux) de mai à septembre 2009, des projets de débardage, d’entretien des prairies, fleuries et vignes et un projet avec la voirie pour la collecte des poubelles et déchets verts du quartier piéton de Nyon. La ville de Coppet nous propose aussi des animations culturelles au Château. Notre atelier propose aussi aux adolescents la thérapie par le cheval. »

Bois de Vincennes : branchages frais pour les girafes

Au Bois de Vincennes, à l’est de Paris (avec un potentiel de 12 millions de visiteurs par an), la ville emploie trois chevaux ardennais et cinq meneurs, en interne, l’atelier a aussi des tâches propres en fonction des saisons : arrosage l’été (300 à 500 arbres), dépressage d’arbustes  et abattage des arbres, tirage de grumes l’hiver, hersage des pistes cavalières, etc. Le ramassage des poubelles dans le Parc floral est à l’étude.

Le service a même fait un essai de tonte avec une tondeuse (mécanique) à lame hélicoïdale. Les girafes du Parc zoologique raffolent des branchages frais qu’il leur apporte. En échange, les vétérinaires du zoo s’occupent de faire les soins et les vaccins des chevaux.


Débardage en terrain difficile. Crédit : Equiterra.
Urbanisme : intégrer le déplacement hippomobile

Une agence d’architecture et d’urbanisme étudie des programmes alternatifs favorisant la biodiversité. « Dans le cadre de l’évolution de la ville de Mordelles (Ille-et-Vilaine), confie Dupeux Philouze, architecte-urbaniste à Rennes, notre travail consiste à accueillir une ZAC (zone d’aménagement concerté) de 50 ha , avec un programme de 2000 habitants, et de 750 logements. Nous voudrions assurer une liaison par un attelage reliant le centre bourg aux deux quartiers Est et Ouest. Il faut vérifier que l’expérience est viable et que l’idée d’utiliser des chevaux est bien adaptée au projet. Les chevaux m’intéressent par l’engagement environnemental qu’il y a avec. Nous sommes dans un secteur agricole que l’on va urbaniser, avec 3000 habitants qui vont arriver en dix ans. J’ai donc une dizaine d’années pour faire aboutir le projet. »
Que les hommes de l’art réfléchissent à inclure du déplacement hippomobile dans de futures ZAC est encourageant.

Fenouillet : « Les policières à cheval vont partout ! »

Fenouillet, au nord de Toulouse, est située en bordure de cours d’eau, avec beaucoup de zones inondables, ni habitées, ni constructibles. « Ces zones étaient assez mal fréquentées, rapporte M. Saint-Paul, de la mairie de Fenouillet (Haute-Garonne) : on y constatait beaucoup de faits délictueux voitures volées, trafic de drogue, prostitution. Pour surveiller les 600 hectares de ces zones, on avait pensé aux motos vertes, aux VTT, mais la constitution des sols, très argileuse, ne s’y prête pas. Étant cavalier, j’ai proposé la création d’une brigade équestre. Le cheval est discret et dissuasif : le maire a retenu mon idée. Notre brigade est composée de 4 agents : un chef de poste, deux cavalières (une policière municipale et une jeune femme embauchée au départ en CES) et un ancien de la Garde républicaine (18 ans d’ancienneté dans la gendarmerie). Les policières à cheval vont partout : elles font la surveillance des parkings, des lotissements, la sortie des écoles ; elles patrouillent en zones vertes, sur terrains durs et mous. Elles sont présentes le week-end sur les ferias, lors des corridas, pour surveiller les parkings. Les résultats obtenus en matière de délinquance sont importants : la baisse de la délinquance chez les jeunes est estimée à 30 % depuis quatre ans. L’avantage le plus flagrant de la brigade équestre, c’est qu’il est un moyen de médiation sociale à travers les enfants ».

Haras nationaux : pour accompagner les projets

Les Haras Nationaux, créés par l’État il y a trois siècles, ont lancé, le 1er janvier 2008, HN Conseil Ingénierie, un cabinet conseil pour accompagner les communes dans la démarche de la mise en place d’un cheval territorial. « Nous proposons des produits clé en main, dit Geneviève de Sainte-Marie : le cheval omnibus, la brigade équestre et le cheval cantonnier ». Il s’agit de favoriser la professionnalisation des projets, en mettant l’accent sur l’innovation technique : étude de faisabilité des tâches à réaliser, des distances, de la superficie à couvrir ; établissement du budget d’investissement et de fonctionnement ; indications sur le type de cheval à employer, le matériel ; aide à l’achat du cheval en fonction des contraintes de la commune ; achat du matériel, suivant les futures activités du cheval (entretien d’espaces verts, arrosage des fleurs, ramassage du verre) ; formation du personnel ; maintenance annuelle au quotidien, etc.

Pour en savoir plus

Haras nationaux : sont présents dans tous les départements de France (20 haras et 110 centres techniques), afin de répondre aux besoins des éleveurs et des détenteurs d’équidés, professionnels ou particuliers, des collectivités territoriales et des entreprises.

Equiterra : association créée en 2005, labellisée « pôle d’excellence rurale », pour valoriser l’utilisation moderne du cheval de trait sur un territoire urbain, en tant qu’acteur du développement durable.

Fectu : Fédération Européenne du Cheval de Trait pour la promotion de son Utilisation www.fectu.org

Pourquoi le tri sélectif est utile

La plupart d’entre nous, aujourd’hui, trions nos déchets. Mais que deviennent les matières triées ? Le tri est vraiment utile : la preuve par les chiffres.

  Ce cabas est fait à 90 % de PVC recyclé en provenance de déchets de voilerie et de sellerie nautiques.

Les déchets d’emballages représentent, en France, 5 millions de tonnes par an, sur 46 millions de tonnes de déchets municipaux et 846 millions de tonnes de déchets au total. C’est dans le secteur de l’emballage ménager que le taux de recyclage est le plus élevé : 2 935 000 tonnes, soit 61 % du total en 2007.

Le gestes de tri des emballages permettent une économie d´énergie de 5 840 GWh, soit l’équivalent de la consommation d´énergie domestique d’une ville de 566 000 habitants. Ce faisant, ils évitent l´émission de  1,8 million de tonnes de CO2, soit 0,3 % des émissions totales de CO2 (dioxyde de carbone) de la France. La collecte sélective permet également l’économie de 25,7 millions de m3 d’eau, soit l’équivalent de la consommation de 470 000 personnes pendant un an.

Tonnages de déchets d’emballages ménagers recyclés – 2007
(milliers de tonnes)
Verre 1 907
Papier-carton 463
Plastique 218
Acier 84
 Aluminium  5
 Acier mâchefer* 232
Aluminium mâchefer* 12
 Papier-carton compost  14
Total
2 935

 * Mâchefer : résidus d´incinération des ordures.

Ces bilans tiennent compte des nuisances engendrées par les bennes de collecte. Les économies d’eau et d’énergie sont réalisées par le fait que l’industrie utilise des matières premières secondaires (récupérées) au lieu de matériaux vierges : calcin dans les fours verriers, fibres cellulosiques de récupération dans l’industrie papetière, fibres textiles, gaines et tuyaux en plastiques recyclés, etc.

Exemple avec le plastique PET (polyéthylène téréphtalate): la collecte et le tri occasionnent 0,2 tonnes équivalent CO2. Mais son recyclage fait gagner 1,8 t eq CO2 ; le traitement évité : 0,7 t eq CO2. Le bénéfice global est donc de 1,8 + 0,7 – 0,2 = 2,3 t eq CO2.

Le verre est entièrement réutilisé pour la production de nouvelles bouteilles. L’acier et l’aluminium reviennent en métallurgie comme métaux de seconde fusion. Les métaux, recyclables à l’infini ont de très nombreuses applications dans tous les secteurs de l’industrie et de la consommation.

  Ce flacon contenant du produit d’entretien est composé de 98 % de matière recyclée provenant de l’agriculture : son de blé, paille de blé, pulpe de betterave.

Les plastiques permettent de fabriquer des textiles synthétiques (40 %), des tubes pour l’industrie du bâtiment (18 %) et toutes sortes de produits de la plasturgie : feuilles, cerclages,  bacs, palettes, flaconnages… Les applications dans l’emballage alimentaire (bouteilles) sont en pleine expansion, les techniques et les réglementations étant désormais au point.
Les papiers-cartons sont souvent utilisés pour la production de nouveaux emballages et de produits cellulosiques divers.

La collecte sélective des déchets d’emballages représente aussi 130 millions d’euros de recettes qui aident à financer le système. Le recyclage des emballages permet d’éviter 58 millions d’euros d’investissements dans les efforts de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

(Source : Eco-Emballages)

Aernoudt, un chevalier blanc flamand en Wallonie

Rudy Aernoudt, 48 ans, président du parti LiDé et professeur d’économie, veut réunir Flamands et Wallons et redynamiser la Belgique. Comment ? En encourageant l’esprit d’initiative et en s’attaquant à la corruption.


Rudy Aernoudt

Rudy Aernoudt a deux maisons : à Laethem-Saint-Martin, commune néerlandophone située en région flamande près de Gand, et à Lustin, en province de Namur (région wallonne). Il parle, bien sûr, les deux langues. Mais il n’a qu’un pays, la Belgique, empêtrée depuis des années dans une vraie-fausse guerre de sécession : «Je n’accepte plus ce western qui oppose des cowboys et des Indiens avec, au milieu d’eux, le bâtard qu’est Bruxelles. Il faut arrêter cette guerre entre deux peuples et ces discussions frontalières. Nous devons nous rendre dignes d’héberger l’Europe et d’en être la capitale. Jusqu’à présent, c’est tout l’inverse que nous avons fait !»

L’an dernier, Rudy Aernoudt a fondé LiDé, parti libéral démocrate, qu’il préside. “Li” comme libéral, qui croit au bons sens et à l’initiative («ce qui n’a rien à voir avec le libéralisme»), et “Dé” comme démocrate, «qui écoute les gens ». Et “l’idée”, car, « comme disait Victor Hugo, rien n´arrête une idée dont le temps est venu !»

Ce n’est pas pour rien que Rudy a fait cinq années d’études philosophiques : « Je suis un idéaliste qui veut que les choses bougent. Les circonstances m’ont mis sur une carte où je peux avoir un impact. Étant professeur d’économie à temps plein, j’ai les mains libres pour ma tâche ».
Et il y a du travail ! « Tel qu’il fonctionne aujourd’hui, le système étouffe l’initiative. Le pays compte 500 000 chômeurs. 40 % d’entre eux gagnent plus en touchant leurs allocations que s’ils travaillaient. La Belgique est le seul pays au monde où l’on peut être chômeur toute sa vie. Il y a des gens qui ont été indemnisés pendant 40 ans et qui prennent leur retraite sans passer par la case “emploi”. Une étude universitaire a révélé que, en équivalent temps plein, 300 000 personnes travaillent au noir. Dans le même temps, des entreprises cherchent des salariés qu’ils ne trouvent pas… Il faut redonner l’envie de travailler en réformant le système. On pourrait déjà limiter la durée de l’indemnisation du chômage à trois ans. »

Autre combat de Rudy Aernoudt, celui mené contre « le virus de la corruption et du clientélisme » : « Toutes les semaines, un nouveau scandale sort.  Il n’y a pas assez de rotation dans les instances politiques. Ce sont les mêmes qui occupent longtemps les postes. On compte 5 000 personnes dans les cabinets ministériels. Le système favorise le copinage. Beaucoup de logements sociaux sont occupés par des personnes appartenant à des partis politiques, alors que 17 % des gens vivent sous le seuil de pauvreté et n’accèdent pas facilement au logement social. Devant ce constat, on peut comprendre que les Belges n’ont plus le goût de faire des efforts. Et que les Flamands protestent : ils ne veulent plus que les transferts aux Wallons (plusieurs milliards d’euros par an) servent à remplir les poches des politiciens corrompus ».

« J’ai commencé par faire le ménage en Flandre »

Rudy a un bon argument : avant de venir prôner la bonne gouvernance en Wallonie, il a mené ce combat en Flandre. En 2007, il avait été licencié de son poste de secrétaire-général du département économie, science et innovation du gouvernement flamand pour avoir dénoncé des affaires de corruption dans l’administration. Il avait notamment déposé une plainte pour des irrégularités à propos de certaines études au cabinet de la ministre Mme Moerman… dont il était le chef de cabinet et qui a dû démissionner par la suite! Il avait également publié, en 2003, «Corruption à foison : Regards sur un phénomène tentaculaire», L’Harmattan.

En s’attaquant à la corruption, le politicien «enlève les arguments des séparatistes flamands. En Flandre, le gouvernement a été contraint de prendre des mesures : les cabinets ministériels ne peuvent plus désormais attribuer directement les contrats. Ceux-ci doivent passer par un jury indépendant. J’ai donc commencé par chez moi avant de venir en Wallonie faire le même ménage».

De même, « il faut arrêter d’envoyer à l’Union européenne les personnes qu’on veut remercier ou dont on veut se débarrasser. Nous devrions plutôt choisir de très bons éléments. Et pas des vieux de 75 ans, mais des jeunes qui ont envie de changer les choses ! »
Parmi les autres priorités de LiDé, la réforme du système éducatif et celle de la fiscalité : « Avec 6 000 € par an de revenu, les Belges sont taxés à 30 %. Nous voulons qu’ils soient exonérés jusqu’à 12 500 € de revenu, puis taxés à 19 % au-delà ».

Politiquement, LiDé se sent proche des Verts écolos et du Mouvement réformateur (centre-droit), même si ce dernier est « moins radical » que LiDé.

Enfin, Rudy Aernoudt suggère que la Belgique et la France, « qui se ressemblent beaucoup, surtout par leurs faiblesses », entreprennent plus ensemble. Par exemple, pourquoi ne pas créer une plateforme économique commune entre Courtrai, Mouscron, Tournai et la région lilloise ? Pourquoi ne pas mettre en œuvre un pôle commun de compétitivité dans l’agroalimentaire ou dans l’aéronautique, points forts dans les deux pays ?

Le franc CFA toujours contrôlé par Paris

Au sortir de la colonisation, les pays africains et la France signèrent une convention réglant leurs relations monétaires. Certaines voix s’élèvent pour dénoncer le caractère inéquitable de ce contrat toujours en vigueur et la dépendance africaine : aujourd’hui encore, la monnaie des pays de la Zone franc est pour une bonne part contrôlée par le Trésor public français. Pour ces commentateurs, une plus grande autonomie des économies africaines est souhaitable. Mais leurs chefs d’État auront-ils le courage de la réclamer et de s’organiser pour être enfin autonomes ?    

  Le professeur Nicolas Agbohou en mode Gainsbarre… Selon lui, les institutions et les principes de fonctionnement de la Zone franc CFA bloquent le décollage socio-économique et politique de l’Afrique.
Nicolas Agbohou est professeur associé à l’Institut Cheikh Anta Diop de l’Université du Gabon et enseigne les sciences et techniques économiques en France.
Crédit y-voir-plus.ivoire-blog

« Poser la question de la souveraineté financière de l’Afrique serait-il un acte révolutionnaire, dangereux ou anticolonialiste ? Non, il s’agit d’une revendication logique d’égalité entre partenaires de même rang, comme le sont les États africains de la Zone franc et la France. »
L’auteur de ces propos, Dominique Kounkou, docteur en droit international public, avocat inscrit au Barreau de Paris, suggère que « le temps de la monnaie africaine est arrivé ». Dans un livre récent(1) , qu’il a présenté le 23 octobre dernier dans les locaux de l’ambassade de Côte d’Ivoire, il s’étonne que les comptes des pays africains de la zone franc soient gérés encore à l’heure actuelle, et donc contrôlés, par le Trésor français par l’intermédiaire des fameux comptes d’opérations (voir ci-dessous). Une situation de dépendance qui lui semble archaïque et malsaine, même si, apparemment, cette situation résulte d’une convention entre les différents partenaires. La France, dans cette configuration, paraît un peu plus « égale » que les autres…

Pour Dominique Kounkou, « s’il est important pour les Africains de disposer de leur propre monnaie pour asseoir la coupure du cordon ombilical avec la France, cette quête d’identité monétaire ne saurait faire l’économie d’un travail de fond : juridique, politique, économique et sociologique ».

Légende : Lors de la présentation de son livre à l’ambassade de la Côte d’Ivoire.

Photo : JL ML.

Du pacte colonial à la Convention de 1972

La Zone franc regroupe 14 pays d’Afrique sub-saharienne(2) , les Comores et la France. Elle est issue, comme le dit la Banque de France, de « l’évolution de l´ancien empire colonial français et de la volonté commune de ces pays de maintenir un cadre institutionnel qui a contribué à la stabilité du cadre macroéconomique ». En 1959, les pays d’Afrique de l’Ouest s’associent au sein de la BCEAO (Banque Centrale des États d’Afrique de l’Ouest). La même année, les pays d’Afrique centrale créent la BCEAEC qui deviendra la BEAC (Banque des États de l’Afrique Centrale). Les principes de la coopération monétaire entre la France et les États membres de la zone franc ont été énoncés dès les années 1960 dans le cadre d’un pacte colonial. Ce pacte a été modifié par la convention de coopération monétaire du 23 novembre 1972 entre les États membres de la Banque des États de l’Afrique Centrale (BEAC) et la France d’une part, et par l’accord de coopération du 4 décembre 1973 entre les pays membres de l’Union Monétaire Ouest-africaine (UMOA) et la République française d’autre part.

Les 4 principes de la coopération Zone franc/France

La coopération monétaire entre la France et les pays de la Zone franc est régie par quatre principes fondamentaux :

  • la garantie du Trésor français à la convertibilité en euros des monnaies émises par les trois instituts d´émission de la zone ;
  • la fixité des parités entre l’euro et les francs CFA ;
  • la liberté des transferts au sein de chaque sous-ensemble ;
  • la centralisation des réserves de change. Depuis 1975, ces réserves de change bénéficient également d’une garantie de non-dépréciation.

En contrepartie de cette garantie, les trois banques centrales sont tenues de déposer une partie de leurs réserves de change auprès du Trésor français sur leur compte d’opérations.

Le fonctionnement du compte d’opérations a été formalisé par des conventions entre les autorités françaises et les représentants des banques centrales de la Zone franc. Ils fonctionnent comme des comptes à vue ouverts auprès du Trésor français, sont rémunérés et peuvent, dans des circonstances exceptionnelles, devenir débiteurs.

Lors de l’adoption de l’euro, la monnaie européenne a remplacé le franc comme ancre monétaire des francs CFA et comorien. C’est là un point qui chiffonne Dominique Kounkou, pour qui il y a eu alors rupture unilatérale de contrat : « La perte de la souveraineté monétaire de la France au profit de l’Union européenne pose de nombreuses questions. Imposée de fait aux États africains, elle est anti-conventionnelle. Dans la convention de 1972, il n’est prévu aucune possibilité de monnaie substitutive au franc français ».
Il aura fallu attendre le 20 septembre 2005 pour, en quelque sorte, « régulariser » la situation au moyen d’un avenant réformant la coopération monétaire dans la zone Union Monétaire Ouest Africaine (UMOA).

Des négociations sous la contrainte

Mais le bât blesse aussi ailleurs, dans « la contrainte exercée par la France puis par l’Union européenne sur les États africains membres de la zone BEAC. C’est la théorie des traités inégaux. Vu la manière dont s’est opéré le passage du franc français à l’euro, on serait tenté de dire que l’Afrique a été obligée de consentir à l’arrimage de sa monnaie à l’euro sous l’empire de la contrainte, comme ce fut le cas dans la période coloniale. Les négociations menées à l’époque le furent dans le contexte des relations entre puissance européennes et chefs de tribus de l’Afrique centrale à qui les Européens montraient des cartes volontairement falsifiées. Ainsi, nous avons été ramenés à la problématique de la contrainte exercée sur les États africains. Traditionnellement, cette contrainte s’exerce par la force armée. Depuis les indépendances, elle est constituée par de la pression politique et économique ».

C’est pourquoi, selon Dominique Kounkou, ces « conventions inégales » devraient être «considérées comme invalides à cause notamment de l’absence de réciprocité réelle dans les prestations et des risques d’atteinte à l’autodétermination que de telles conventions impliquent ». Certains chefs d´État ne veulent plus de cette position monétaire. Le problème est qu´ils n’expriment pas officiellement leur désaccord. Quelques collectifs, des ONG internationales(3)  et des Ivoiriens, se battent aujourd’hui sur cette question de la monnaie.
A l’heure actuelle, ce sont plutôt des personnalités de second rang qui s´expriment officieusement
Ainsi Mamadou Koulibaly, président de l’Assemblée nationale de Côte d’Ivoire et professeur d’économie. Dans un entretien réalisé pour New African, il fait la critique du système actuel et prône la construction d´une monnaie africaine.

Pour Mamadou Koulibaly, président de l’Assemblée nationale de Côte d’Ivoire et professeur d’économie, les banques africaines de la Zone franc « n’ont aucun pouvoir et ne sont rien de plus que de gigantesques institutions bureaucratiques qui ne décident pas des politiques monétaires ».

La zone du franc CFA, dit-il, est « une union de coopération monétaire dont les leviers de contrôle se situent à Paris où priment les intérêts de la France. Juste avant que la France n’accède aux demandes d’indépendance des pays africains dans les années 1960, elle a obligé ces États à placer 65% [50 % aujourd’hui, ndlr] de leurs réserves de change sur un compte du Trésor français, après avoir défini un taux de change fixe du franc CFA. Bien que la gestion de cette monnaie ait été confiée à des banques centrales communes [BEAC et BCEAO, ndlr], ces banques n’ont d’africain que le nom. En réalité, elles n’ont aucun pouvoir et ne sont rien de plus que de gigantesques institutions bureaucratiques qui ne décident pas des politiques monétaires ». Pour M. Koulibaly, cette union a apporté à la France « d’immenses avantages en termes de marchés pour ses biens et services. (…) Par exemple, les réserves de change des États de la zone franc sont placées sur un compte commun du Trésor français, mais aucun pays africain n’est capable de dire quelle partie de cet argent durement gagné lui appartient. Seule la France a le privilège d’accéder à ces informations. Et pourtant ces fonds, placés sur des “comptes d’opérations”, génèrent des intérêts à chaque fois que leur montant est supérieur aux besoins d’importation des pays africains concernés».

La réforme de la coopération monétaire France/Zone franc
(selon le Sénat français)

– La réforme des relations avec l’UMOA

A la suite de l´introduction de l´euro, une réforme de la coopération monétaire dans la zone Union monétaire de l’Afrique de l’Ouest (UMOA) a été conclue par un avenant, signé le 20 septembre 2005, à la convention de compte d´opérations du 4 décembre 1973 entre la France et la Banque centrale des Etats d’Afrique de l´ouest (BCEAO). Les aménagements techniques ont été les suivants :

  • le taux de centralisation obligatoire des avoirs extérieurs nets de la banque centrale sur le compte d’opérations est fixé à 50 %, contre 65 % auparavant ;
  • la gestion de la fraction des avoirs que la BCEAO gère en propre peut être effectuée librement, dans le cadre des dispositions de l’avenant et d’une politique d’investissement et de contrôle des risques mise en place par la BCEAO, conformément à ses dispositions statutaires ;
  • en contrepartie, le solde créditeur du compte d´opérations est assorti d’une rémunération différenciée assise sur les taux de la Banque centrale européenne, selon qu’elle s´applique à la quote-part des avoirs qui doit être conventionnellement centralisée au compte d’opérations, ou au solde excédant cette quote-part ;
  • enfin, la garantie de la valeur des avoirs contre une dépréciation de l’euro est appliquée exclusivement à la quote-part des avoirs obligatoires (soit 50 %).

– La réforme des relations avec la CEMAC

Une réflexion a également été engagée en 2006 dans la CEMAC (Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale) et un avenant à la convention de compte d’opération a été signé en janvier 2007 avec la banque des États de l’Afrique centrale (BEAC). Comme pour l’UMOA, la réforme consiste à abaisser progressivement (en trois étapes, du 1er juillet 2007 au 30 juin 2009) de 65 % à 50 % la quotité des avoirs extérieurs de la BEAC obligatoirement déposés sur le compte d’opérations du Trésor français, et à n’appliquer les avantages consentis sur le solde créditeur en co
pte d´opérations qu’à cette seule quotité.

Dans les deux cas, l’int&eacut
;rêt de cette réforme est de donner une plus grande autonomie à la BCEAO et à la BEAC dans la gestion de leurs avoirs et de leurs réserves de change. En limitant les avantages consentis sur le solde créditeur en compte d’opérations (une rémunération avantageuse et la garantie de change) à la seule quotité obligatoirement déposée, ces réformes permettent également une économie budgétaire substantielle pour les finances publiques, a fortiori dans le contexte actuel de forte hausse des réserves de change des pays de la Zone franc.

En contrepartie, la France s’est engagée à soutenir l´intégration régionale dans la zone. Elle apporte ainsi depuis 2005 un financement annuel de 20 millions d´euros, sous forme d’aide budgétaire globale, au Programme économique régional de l’UMOA. Un engagement comparable a été pris en zone CEMAC et se traduit par un financement de 10 millions d’euros à la commission de la CEMAC en 2008 puis de 20 millions d’euros par an à partir de 2009.

(Source : projet de loi de finances 2009)

Respecter et se faire respecter

Si la Zone franc perdure depuis plus de soixante ans, malgré les effets négatifs qu’elle continue de produire dans pays africains, cela est dû, selon Mamadou Koulibaly, « à l’influence que la France exerce sur les pays d’Afrique francophone, même si les partisans utilisent les arguments suivants pour défendre leur position : garantie monétaire, qui génère un afflux de capitaux, mesures d’austérité limitant le risque d´inflation et permettant de maintenir l´équilibre de la balance extérieure, et crédibilité de la monnaie ».

Les partisans du franc CFA ignoreraient « la répression politique et financière qu’ont exercée les présidents français successifs sur les pays africains qui ont tenté de se retirer de la zone franc. (…) Nous avons été témoins de mesures répressives visant à couper court à toute velléité d’émancipation du système : la protection des intérêts français a engendré récemment des crises au sujet de l’uranium au Niger, de l’or au Mali, du pétrole au Tchad, des matières premières et du transfert des actions d’entreprises du service public en Côte d’Ivoire, auxquelles sont à ajouter d’autres crises au Rwanda, en République démocratique du Congo et au Sénégal ».

Pour le parlementaire ivoirien, M. Koulibaly, le CFA doit acquérir une autonomie, se libérer du « joug colonial : il suffit que nous décidions de nous choisir nos politiques et d’en assumer la responsabilité. La liberté n’a de sens que si elle est assortie de responsabilité ». De son côté, Dominique Kounkou met l’accent sur la responsabilité des élites africaines : «La Zone [franc] a fait ses preuves, malgré l’économie de traité inégal qui l’a fait naître. Elle est maintenant un modèle qui peut servir à la mise en place d’une monnaie africaine. Savoir faire prospérer cet héritage qui a façonné les pays d’Afrique centrale est une haute responsabilité dont on ne peut pas se dédouaner en accusant toujours le colonisateur. Le défi actuel de l’Africain est de se positionner en acteur responsable et capable de négocier pour ses propres intérêts en respectant ses partenaires et en se faisant respecter par les acteurs du monde».

CFA signifiait entre 1945 et 1958 colonies françaises d´Afrique, puis après la décolonisation communauté française d´Afrique. Le franc CFA sera-t-il un jour réellement franc de la communauté financière d´Afrique ?

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(1) D. Kounkou, Monnaie africaine – La question de la zone franc en Afrique centrale, L’Harmattan, Paris, 2008.

(2) En Afrique de l´Ouest : le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d´Ivoire, la Guinée Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo. En Afrique centrale : le Cameroun, la République centrafricaine, le Congo, le Gabon, la Guinée Équatoriale et le Tchad.

(3) Comme le Comité pour l’annulation de la dette du Tiers Monde (CADTM) ou le Centre national de coopération au développement (CNCD).

Menaces sur l’information

Ce n’est pas parce que nous vivons dans un régime démocratique que la vérité et la liberté sont assurées. La qualité de l’information doit être un combat de tous les instants, soit pour préserver des droits existants, soit pour en conquérir de nouveaux. Et il y a du pain sur la planche : quelques exemples actuels avec l’audiovisuel public, l’Ifen, les aides à la presse, l’expertise scientifique…

Le président de la République française, Nicolas Sarkozy,lors de l´ouverture des Etats généraux de la presse fin 2008.
Crédit : www.elysee.fr

 

 

 

Perte d’indépendance : l’audiovisuel public…

Une des conditions majeures de la qualité d’une information est son indépendance. Or la gouvernance de la télévision publique française passe sous la coupe de l’exécutif. Une fois la réforme de l’audiovisuel votée, c’est l’Élysée qui désignera le président de France Télévisions. Comme, dans le même temps, il n’est pas prévu de donner aux  journalistes et aux rédactions les moyens juridiques et structurels de leur indépendance, l’information télévisée publique sera – quoi qu´on en dise – aux ordres de celui qui la finance. C’est-à-dire de l’État, du pouvoir politique.

C’est un recul énorme en matière de liberté d’information. Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication, argue que « les rédactions des journaux télévisés sont indépendantes. C’est faire injure aux journalistes que de prétendre qu’ils sont incapables de résister aux pressions ». Cette affirmation est la preuve ou d’une bien grande naïveté, ou d’une tout aussi grande hypocrisie. Certes, le temps est – presque – révolu où le pouvoir dictait directement ses volontés aux patrons des chaînes. Certes, la censure n’ose plus s’afficher aujourd’hui aussi effrontément que dans le passé.

Mais le proverbe « qui paie commande » reste vrai. Dire qu’il n’a pas cours quand il s’agit de rédactions journalistiques, si fières de leur indépendance, c’est grandement méconnaître la réalité. En effet, le plus grand mal dont souffre notre profession aujourd’hui est bien l’autocensure, essentiellement économique. Avec la réforme, les rédactions seront d’autant plus assujetties à leur actionnaire qu’elles sont toutes déjà dans une situation statutaire de subordination à leur employeur. Les devoirs d’obéissance, de loyauté et de discrétion professionnelle seront alourdis par la crainte de déplaire à l’actionnaire. Ce qui autorisera bien des dérives.

…l’évaluation environnementale

L’environnement est devenu enfin une préoccupation du grand public. Les informations statistiques à son sujet en France (sources de pollution, industrielles et agricoles, ressources naturelles et biodiversité, attentes des Français en matière d’environnement, reporting national et régional sur l’environnement) étaient jusqu’à maintenant rassemblées par l’Institut français de l’environnement (Ifen).

Cet établissement public indépendant a été dissous par décret le 27 novembre 2007. Il est remplacé par un tout nouveau Service de l’observation et des statistiques (SOeS) au sein du ministère de l’écologie. Il perd ainsi sa capacité d’évaluer de manière impartiale les politiques environnementales du gouvernement. C’est d’autant plus ennuyeux que l’Ifen est correspondant français de l’Agence européenne pour l’environnement, en matière d’inspection. Les données statistiques sur les pollutions de l’air, de l’eau et des sols, sur la détérioration du littoral par l’industrie chimique et l’agriculture intensive seront désormais produites par le ministère de l’écologie, et non plus par une agence autonome.

C’est la victoire de la communication sur l’information.

L’info sur l’info ? Prudence !

Peu de gens savent qu’environ 1,5 milliard d’euros sont accordés chaque année à la presse d’information générale au titre de l’aide publique (directe et indirecte). Selon les autorités, ce coup de pouce à la presse vise trois objectifs majeurs : le développement de la diffusion, la défense du pluralisme, la modernisation et la diversification vers le multimédia des entreprises de presse.

Il serait logique que les chiffres et les informations concernant cette aide, qui est financée par nos impôts, soient publics. D’abord, le chiffre global de 1,5 milliards d’euros n’est jamais donné tel quel. Il résulte de nos propres calculs et estimations.

Ensuite, si vous souhaitez connaître la somme globale versée et le montant et l’affection par journaux de ces aides, voici ce que vous répond la Direction du développement des médias (DDM), direction placée sous la responsabilité du premier ministre :

« C’est délicat… Non pas que cela soit confidentiel, mais cela demande un travail de synthèse qui n’est pas fait. On travaille par familles de presse ou par fonds. Chaque fonds a ses critères propres. Ponctuellement, nous vérifions à ne pas dépasser les limites fixées par le droit européen. Concernant la publication des chiffres et les éléments nominatifs, nous avons la consigne d’être prudents : c’est un sujet politiquement sensible. Chaque information peut avoir des conséquences politiques disproportionnées… Moi, je ne peux pas vous en dire plus : voyez avec le conseiller technique en charge de la question ».

Ce dernier, plusieurs fois contacté, n’a jamais donné de réponse.

Les aides publiques à la presse

Les aides directes

Les aides à la diffusion

  • Les réductions tarifaires de la SNCF
  • L’aide à l’impression décentralisée des quotidiens
  • L’aide à la modernisation des diffuseurs
  • Le fonds d’aide à la distribution et à la promotion de la presse française à l’étranger
  • L’aide au portage de la presse quotidienne d’information politique et générale
  • Aide à la distribution de la presse quotidienne nationale d’information politique et générale

Les aides concourant au maintien du pluralisme

  • Le fonds d’aide aux quotidiens nationaux d’information politique et générale à faibles ressources publicitaires
  • Le fonds d’aide aux quotidiens régionaux, départementaux et locaux d’information politique et générale à faibles ressources de petites annonces
  • L’aide aux publications hebdomadaires régionales et locales

Les aides visant à la modernisation et à la diversification vers le multimédia des entreprises de presse

  • Le fonds d’aide au développement des services en ligne des entreprises de presse
  • Le fonds d’aide à la modernisation de la presse quotidienne et assimilée d’information politique et générale

Les aides indirectes

Sur le plan fiscal

Le taux réduit de TVA

  • Le régime spécial des provisions pour investissements
  • L’exonération de la taxe professionnelle des éditeurs et agences de presse

Sur le plan social

  • Le régime dérogatoire des taux de cotisations de sécurité sociale des vendeurs- colporteurs et des porteurs de presse
  • Le calcul des cotisations sociales des journalistes
  • Le statut social des correspondants locaux de presse

Sur le plan postal

  • Les tarifs postaux préférentiels

Il faut ajouter à cela quelques autres lignes de dépense, comme les abonnements publics à l’Agence France presse dont le budget est assuré à 40 % par l’État.

Criminaliser la rétention d’information ?

Dans ce contexte, la proposition du rapport de l’ancienne ministre de l’environnement Corinne Lepage de considérer, dans le domaine de l’expertise scientifique, «l’information du public comme un devoir», et donc de créer un «devoir d’alerte» et un «délit de rétention de l’information quand le risque est avéré», n’est pas pour demain.

Avec une telle exigence, selon Mme Lepage, on aurait pu pourtant condamner les cigarettiers qui possédaient depuis longtemps des études secrètes sur la dangerosité de leurs produits.
Il sera donc toujours difficile, dans les instances officielles, et malgré l’existence d’agences spécialisées, de dénoncer les risques en matière d’environnement et de santé.

L’obstacle majeur reste donc bien celui d’alerter et de convaincre les pouvoirs publics d’agir et de réagir. Heureusement que la société civile n’hésite plus à se mobiliser et qu’Internet permet la libre parole… Mais les résultats ne sont pas toujours à la hauteur des efforts fournis.
Voir également l’action de la Fondation Sciences citoyennes à propos des lanceurs d’alerte scientifique.

En ce qui concerne les lanceurs d’alerte, il y a encore un long chemin à parcourir avant que la société comprenne la nécessité de les protéger. Le cas de Denis Robert (« affaire Clearstream ») le démontre. Pour avoir fait un travail sérieux d’investigation, trop rare de nos jours, le journaliste-écrivain doit faire face à 12 procès et doit prochainement passer en correctionnelle pour « recel d’abus de confiance ». En fait, et tout simplement, pour avoir fait un travail sde journaliste. Même s’il a pu se tromper, il est malsain que la société, par le biais de l’État, cherche à le faire taire plutôt qu’à le défendre.

Restons optimistes

Mais il y a aussi, çà ou là, des bonnes nouvelles. La profession médicale ne brille pas toujours par son souci de transparence. Il a fallu par exemple attendre 2002, avec la loi Kouchner, pour reconnaître tout simplement au patient le droit d’accès à son dossier médical.
On peut donc se réjouir qu´en ce mois de janvier 2009 l’Assurance maladie ait enrichi son site Internet de données sur :
– les actes techniques pratiqués par les professionnels de santé : scanners, échographies, chirurgie de la cataracte ou pose d’une prothèse de hanche, chirurgie du ménisque du genou, endoscopies digestives : au total, une centaine d’actes les plus courants sont concernés ;
– les tarifs qu’ils appliquent habituellement
– leurs adresses et s’ils acceptent la carte Vitale.
Vous accédez facilement à toutes ces informations en complétant un formulaire sur le site.

De son côté, le ministère de la santé a promis le lancement, courant 2009, d’un portail d’information publique sur les médicaments pour tout savoir sur un médicament : composition, niveau d’efficacité, effets secondaires, taux de remboursement…
Ce site sera lié aux instances responsables : ministère de la santé, Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps), Haute Autorité de santé (HAS), Union nationale des caisses d’assurance maladie (Uncam) et réunira toutes les informations publiques disponibles sur les médicaments. Ce portail doit permettre aux professionnels de santé, mais aussi « au grand public d’avoir un accès simplifié à l’information publique ».

Enfin, le procès de l’explosion de l’usine AZF à Toulouse (30 morts en 2001), qui devrait durer quatre mois à partir du 23 février, sera entièrement filmé, une première en correctionnelle en France. L’Association des sinistrés du 21 septembre 2001, qui avait présenté la demande d’enregistrement filmé des audiences, s’est félicitée de la décision du premier président de la Cour d’appel de Toulouse. Jusqu’à présent, seuls ont été filmés en France des procès au caractère éminemment historique, comme ceux de Maurice Papon et de Paul Touvier, jugés pour participation à un crime contre l´humanité…
A moins que les deux seuls prévenus du procès, le directeur de l´usine au moment des faits, et la filiale de Total, la société Grande Paroisse, qui ont décidé de contester cette décision de filmer le procès, obtiennent gain de cause devant la Cour de cassation…