Biodiversité : haro sur les aides publiques pernicieuses

Qui sait qu’en France la TVA sur les pesticides et les engrais est au taux réduit de 5,5 % ? C’est ce que révèle, entre autres, le rapport du Centre d’analyse stratégique (CAS) sur les aides publiques dommageables à la biodiversité.


Crédit photo : jekrub

Avant d’encourager les comportements vertueux, les Etats doivent s’assurer qu’ils ne favorisent pas par ailleurs des pratiques dommageables à l’environnement. C’est en tous cas ce que l’UE (Union européenne) et l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) préconisent de manière de plus en plus pressante. C’est ainsi qu’en France le Centre d’analyse stratégique (CAS) a été chargé d’une étude sur les aides publiques dommageables à la biodiversité.

Le groupe d’études a identifié cinq « grandes pressions » à l’origine de l’érosion de la biodiversité :

  • la destruction et la dégradation qualitative des habitats par la fragmentation, le changement d’usage des terres, l’artificialisation, la simplification et l’intensification des pratiques agricoles ;
  • la surexploitation des ressources naturelles renouvelables (ressources halieutiques, en eau, sols, forêts) ;
  • les pollutions (nitrates, pesticides, thermiques, résidus de médicaments) ;
  • le changement climatique qui agit sur l’ensemble des équilibres ;
  • les espèces exotiques envahissantes.

La réflexion a non seulement porté sur les subventions directes ou indirectes, mais également sur l’« absence d’internalisation de certains effets externes », autrement dit sur les exonérations de redevances liées à des pollutions.

La liste est longue des aides publiques qui nuisent à la biodiversité. C’est un véritable catalogue à la Prévert qui en dit long sur le fonctionnement de l´Etat : aide à la pêche professionnelle par exonération de la TIC (taxe intérieure de consommation) sur les carburants pétroliers, sous-tarification de l’usage des réseaux de transport, incitations à la « simplification des paysages », aides à la construction de logements neufs, tarification de l’eau n’incitant pas à la modération, sous-tarification de la pollution des eaux (nitrates), etc.

Face à ce constat d’éparpillement, le rapport met en avant une sélection de recommandations privilégiant « les plus faciles à mettre en œuvre et les plus conceptuellement innovantes ». N’en retenons ici qu’une, emblématique des questions soulevées par ce rapport, dans le domaine de l’agriculture.

L’utilisation d’engrais et de pesticides continue à être encouragée

Alors que le Grenelle de l’environnement a établi un plan ambitieux de réduction de l’utilisation des pesticides, la France maintient un taux de TVA réduit de 5,5% sur les engrais et les produits phytosanitaires.  Cette aide de 43 millions d’euros par an va également à l’encontre de la politique de développement de l´agriculture biologique issue du même Grenelle, qui a notamment institué un doublement du crédit d’impôt en faveur de l’agriculture biologique (art. 31).

Fort logiquement, le rapport du CAS préconise l’application du taux normal de TVA, comme dans la plupart des pays européens.

Réchauffement climatique

Dans le même registre des aides publiques néfastes à l’environnement, l’OCDE a publié le 4 octobre 2011, conjointement avec l’AIE (Agence internationale de l’énergie), un rapport sur les subventions publiques aux énergies fossiles. Leur montant est estimé à 409 milliards de dollars en 2010 pour l’ensemble des pays.  Pour ces deux institutions, les subventions aux énergies fossiles engendrent une utilisation irrationnelle de l´énergie et une compétitivité moindre des énergies renouvelables.

Organisation de coopération et de développement économiques

Pour aller plus loin :

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3 commentaires pour cet article

  1. Un des aspects que j´apprécie chez Ouvertures est de nous faire bénéficier d´infos qui sont au demeurant à la disposition de tout le monde (rapports officiels, communiqués des pouvoirs publics, etc…) mais que les grands medias – curieusement – ne se bousulent pas pour nous communiquer.

  2. @ Olaf le preux,

    c´est effectivement ce constat qui nous incite à puiser dans cette matière première abondante, pour contribuer à rendre visible tout ce travail effectué loin des feux de la rampe et donner envie d´y aller voir par soi-même. Non seulement les grand médias ne se bousculent pas, mais quand ils en parlent, ils ne donnent pas leurs sources et passent souvent à côté d´infos originales. Ouvertures essaie de donner un éclairage différent et fournit au lecteur les moyens d´aller plus loin.

  3.  

    Dans un monde de plus en plus globalisé, l´information va perdre de plus en plus de son importance, et c´est le pouvoir de réflexion et de questionnement qui va prendre le dessus. C´est pourquoi il s´agit avant tout de faire fonctionner sa matière grise, alors que la psychologie majoritaire et l´esprit ambiant va toujours plus dans la simplification outrancière et simpliste des omissions et des amalgames, et dans l´absence de réflexion par le positionnement idéologique, tribal, ou catégoriste.