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La clef de l’efficacité : faire simple !

Et si la simplicité était un art ? Dans un petit livre sobrement intitulé « Simplicité », un ancien chef d’entreprise partage expérience et réflexions sur l’art d’aller à l’essentiel, qui demande certes du talent, mais aussi beaucoup de transpiration.

Disons le tout de suite, la simplicité dont il s’agit ici n’est pas celle qui est pratiquée par les adeptes de la simplicité volontaire, mode de vie consistant à réduire volontairement sa consommation. Et pourtant le titre de l’ouvrage lui va aussi comme un gant ! Non, le sujet traité ici, c’est la simplicité qu’il faut atteindre pour résoudre les problèmes et agir efficacement. Le vrai défi, nous dit l’auteur, ce sont les problèmes complexes – comme éduquer un enfant – car les problèmes compliqués – comme envoyer un homme sur la lune – se réduisent souvent à une suite de problèmes simples.

La prévision des avalanches est un problème complexe. Elle peut être abordée de manière scientifique, analytique, en faisant des tests sur des échantillons de neige, mais la méthode n’est pas opérationnelle pour des skieurs qui doivent avancer. Finalement, c’est Werner Munter, un alpiniste suisse chevronné, bricoleur de génie et esprit indépendant, qui a fini par imposer sa méthode, la méthode de réduction. En travaillant sur une base de données sur les avalanches, il s’est aperçu que l’on pouvait éviter 40% des victimes en renonçant à seulement 1% des randonnées prévues. En réduisant le nombre de paramètres et en se concentrant sur ceux qui étaient les plus pertinents, il a élaboré une petite grille 3×3 d’aide à la décision, facile à remplir et à interpréter (voir à la fin de cet article).
On retrouve cette méthode de réduction dans de nombreux domaines. Elle consiste à se focaliser sur un petit nombre de facteurs ou d’actions pour obtenir le maximum d’efficacité.

La simplicité est la sophistication suprême

L’auteur, Benedikt Weibel, qui a passé 14 ans à la tête des CFF (chemins de fer suisses), a beaucoup d’admiration pour Munter, qu’il connaît bien, mais en voue une tout aussi grande à Steve Jobs, qu’il cite à de nombreuses reprises. Ainsi cette réflexion du cofondateur et ex-patron d’Apple : « Il s’agit d’aller jusqu’au cœur de la complexité. Pour trouver la vraie simplicité, il faut creuser profond ». Steve Jobs disait aussi : « La simplicité est la sophistication suprême », adage qu’il a appliqué dans de nombreux domaines, que ce soit le design des produits, la publicité ou le management de l’entreprise. Lorsqu’il revient chez Apple en 1996 après 11 ans d’absence, il demande à ses managers d’établir une liste de dix actions prioritaires. Mais après mûre réflexion, il se ravise : « Non seulement trois » ! Avec le succès que l’on sait.

On ne peut simplifier que quand on a une connaissance approfondie du domaine, qui ne peut s’acquérir qu’au prix d’une longue expérience (un minimum de 10 000 heures, quel que soit le domaine, selon ceux qui se sont penchés sur la question !). Il faut acquérir le « coup d’oeil », qui fait voir ce que les autres ne voient pas. Comme le maître d’échec qui voit le coup à jouer sans essayer mentalement tous les coups possibles.

La véritable simplification apporte de multiples bénéfices à l’homme d’action, ne serait-ce que parce qu’il est plus facile de communiquer sur des objectifs simples et peu nombreux! Mais elle peut également apporter des bénéfices inattendus en élargissant son horizon. Ainsi des théories scientifiques qui dévoilent une simplicité cachée sous une apparente complexité et ouvrent la porte à de nouvelles découvertes.

On ne peut que recommander ce petit livre efficace, porteur d’un message simple sans être simpliste et remercier l’auteur de nous en avoir simplifié la lecture avec une table des matières détaillée et des résumés en fin de chapitre. Bien que foisonnant d’anecdotes, d’exemples et de pistes de réflexion, il s’en tient à l’essentiel. Sans blabla, sa bête noire, qu’il pourchasse chez ses étudiants.

Simplicité. L’art d’aller à l’essentiel, Benedikt Weibel, Presses polytechniques et universitaire romandes, 2017, 159 pages

 

Grille d’analyse du risque d’avalanches mise au point par Werner Munter

Pour aller plus loin :

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2 commentaires pour cet article

  1. « La confiance réduit la complexité », lit-on dans les premières pages du livre. Affirmation un peu surprenante au premier abord, parce qu’on n’a même plus conscience que le monde dans lequel on vit repose dans une large mesure sur la confiance qu’on met dans son bon fonctionnement. Faire confiance n’en comporte pas moins des risques. Si j’ai confiance dans la ponctualité des trains, je ne vais pas prévoir une marge importante ni de moyen de transport alternatif au cas où. La confiance est donc un capital qu’il faut entretenir…

  2. La simplicité est le sommet de la sophistication ( où la sophistication suprême} est une phrase de Leonard de Vinci, pas M. Apple…
    Les deux ont eu un internet pour l art visuel, et pour la fabrication d armes pour les puissants de leur temps