Vivre ensemble

André Bellon plaide pour une nouvelle Constituante

TRIBUNE

André Bellon, ancien député PS, ancien président de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale, préside l’Association pour une Constituante, « pour que vive la souveraineté populaire ».
Crédit photo : Jean-Luc-Martin-Lagardette.

« La crise actuelle incite de nombreux citoyens à considérer la démocratie comme un combat secondaire. Et son dévoiement par des institutions et des partis qui la contournent incite peu à la défendre. Le premier combat est de lui redonner son sens face aux attaques qu’elle subit. Le suffrage universel est l’instrument nécessaire du pouvoir du peuple.

Mais, depuis que le principe en a été admis, nombreux ont été les moyens utilisés pour en contourner le sens et la mise en œuvre. Et, aujourd’hui, des philosophes fortement médiatisés minent les principes mêmes de l’idée démocratique. Grâce à leurs travaux idéologiques, le mot de peuple  entraîne la réaction populiste, le mot de souveraineté la réaction souverainiste, le mot de nation la réaction nationaliste.

Célébrer la souveraineté populaire et la bafouer compte même parmi les figures imposées du jeu politique. Ainsi, le Parlement français ratifiant le traité de Lisbonne, jumeau du traité constitutionnel rejeté par les électeurs le 29 mai 2005. La plupart des partis assignaient d’ailleurs aux élections européennes l’objectif de “réconcilier” le “oui” et le “non”. Mais cette idéologie du consensus n’est-elle pas antinomique de la démocratie ?

Le système politique et social a peur de la contradiction, des oppositions. Or, la démocratie a été inventée, non pour supprimer les conflits, mais bien pour les résoudre. Lorsque le grec Clisthène instaura le suffrage universel à Athènes, il avait pour but de trancher les conflits de manière pacifique, de trouver une règle du jeu acceptable librement par tout citoyen.

Depuis, cette fonction a été dévoyée, la démocratie est devenue recherche de tranquillité. Or, la seule tranquillité absolue, c’est la mort ! Ceux qui aspirent à la disparition des conflits dans l’organisation de la société ne savent pas qu’ils s’opposent à la vie.

Aujourd’hui, et notamment depuis les années Mitterrand, la démocratie est présentée comme la recherche de consensus, du plus grand dénominateur commun. Je ne suis pas d’accord ! Il faut faire vivre le dissensus et chercher à le résoudre, mais pas le fuir ! La presse, de ce point de vue, néglige ou méprise les points de vue minoritaires ou simplement oppositionnels lorsqu’ils ne sont pas “politiquement corrects”. On l’a vu de façon criante lors de la campagne autour du traité constitutionnel européen.

Le système politique n’est plus en état de gérer les contradictions entre les aspirations des citoyens et l’état continu de crise institutionnelle. La réforme du système est impossible : les dysfonctionnements sont trop nombreux. Les tensions, la misère sociale et la violence qui en résultent  montrent la nécessité d’une nouvelle Constituante. C’est une solution rassembleuse, démocratique et pacifique. En mathématiques (ma formation), on dit : “Quand un problème est insoluble, il faut sortir de l’épure”. Le moment est venu, il faut tout remettre à plat et recréer une nouvelle dynamique. »

> Voir aussi l’interview d’André Bellon sur Europe Créative : « Nous allons vers une grave alternative : l’officialisation de la dictature ou la parole au peuple ».

>> Envoyer un droit de réponse

Les commentaires sont fermés.