Les psychothérapeutes en exercice perdent la guerre des psy

Le décret d’application de la loi réglementant le titre de psychothérapeute est enfin paru le 20 mai 2010 (JO du 22 mai). Après le 1er juillet, personne ne pourra plus revendiquer cette appellation sans satisfaire un certain nombre de conditions. C’est heureux, mais les principaux intéressés, les psychothérapeutes en exercice, sont pratiquement exclus du dispositif. Et les risques de dérives dans le domaine de la « psy » ne sont pas forcément écartés pour autant.


A écouter : une intervention de Bruno Dal-Palu, président de la Fédération
PsY en Mouvement.

La guerre des « psy » s´achève par la défaite (momentanée ?) des psychothérapeutes. Le décret d´application qui réglemente désormais leur activité leur retire  en pratique le droit de porter ce titre.

Celui-ci, jusqu´au 1er juillet prochain, est encore librement accessible. Pas de formation spécifique ni de condition d’exercice exigées. Il suffit en effet de se proclamer psycho-thérapeute pour en avoir le titre et recevoir des patients, ce qui laisse la porte ouverte à d’éventuelles dérives sans moyen de les corriger.

L’article 52/91 de la loi Accoyer de 2004 et son décret d’application de mai 2010 réglementent l’usage de ce titre. À partir du mois prochain, toute personne désirant exercer la fonction de psychothérapeute doit être inscrite sur un « registre national » et justifier d’une formation en psychopathologie de 400 heures et d’un stage pratique d’au moins un mois.

Médecins, psychanalystes, psychologues et psychiatres pouvaient bien sûr, mais comme n’importe qui, se prévaloir de cette appellation en plus de leur spécialité (qui elle est réglementée).

Grâce au décret, ces quatre groupes professionnels pourront conserver le titre à condition de suivre certaines formations, sauf pour les psychiatres qui sont d’emblée considérés comme psychothérapeutes. Et les médecins auront moins de formation à suivre que les psychologues cliniciens, ceux-ci moins que les psychologues non-cliniciens, et ceux-ci moins que les psychanalystes. En fin de course, ce sont pour les « professionnels n´appartenant à aucune des catégories précédentes » que les exigences sont les plus lourdes (400 h au total, voir tableau ci-dessous).

Nombre d´heures de formation en psychopathologie clinique
exigées des candidats au titre de psychothérapeute


Annexe du décret du 20 mai 2010
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Mais, et c’est là que bât blesse, le préalable à cette formation en exclut les « professionnels n’appartenant à aucune des catégories précédentes » c’est-à-dire un grand nombre de psychothérapeutes ! L’article 1er stipule en effet clairement : « L’accès à cette formation est réservé aux titulaires d’un diplôme de niveau doctorat donnant le droit d’exercer la médecine en France ou d’un diplôme de niveau master dont la spécialité ou la mention est la psychologie ou la psychanalyse ».

Des mesures transitoires permettront à certains professionnels « hors catégorie » de plus de 5 ans d’installation de s’inscrire sur le registre après avoir satisfait aux exigences de formation et de stage si leur demande est acceptée par une commission composée de représentants des trois autres professions. C’est-à-dire par leurs concurrents, voire leurs détracteurs. En tout cas, par des professionnels qui seront à la fois juges et parties…

Et ceux-ci n’auront pas à justifier leur décision : « Le silence gardé par l’autorité préfectorale à l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la réception du dossier complet vaut décision de rejet de la demande ».

Dorénavant, il faudra être médecin, psychologue ou psychanalyste pour prétendre au titre de psychothérapeute. Les psychothérapeutes hors catégorie continueront donc d’exercer sous d’autres appellations (praticien en thérapie personnelle, conseiller psycho-relationnel, analyste transactionnel, analyste psycho-organique, Gestalt-thérapeute, etc.).

Suspects d´être des gourous reconvertis

Ils risqueront alors d’être accusés d’exercice illégal de la médecine et, désormais, de la psychothérapie. La Miviludes, le Conseil de l’ordre des médecins et les associations anti-sectes, qui dénoncent maintenant, outre les médecines non conventionnelles, le développement personnel, les formations à la communication et le coaching comme pratiques à risque, ne manqueront pas de les pourchasser.

Dès lors, le mécontentement des psychothérapeutes en exercice se comprend : alors que les professions en place pourront seules, dans les faits, récupérer le titre, eux en sont dépossédés car suspects à prioiri d’être des gourous ou des charlatans reconvertis. Leurs compétences, leur professionnalisme et leur éthique sont volontairement ignorés des pouvoirs publics. La spécificité même du métier est niée puisqu’un psychiatre non formé à la psychothérapie pourra parfaitement se prétendre d’emblée psychothérapeute sans rien connaître de cette discipline contrairement à son confrère qui pourra avoir suivi sept années de formation !

Pourtant, depuis une vingtaine d’années, les fédérations de psychothérapeutes ont tenté de faire réglementer la psychothérapie comme profession par les pouvoirs publics. Une proposition de loi relative à l´exercice de la profession de psychothérapeute avait même été déposée le 28 mars 2000 à l´Assemblée nationale par les députés Marchand, Aschieri, Aubert, Cochet et Mamère (n° 2288).

Grand apéro psy le 1er juillet

« Nous soussignés, Psychothérapeutes, reconnus par nos Ecoles, nos pairs et nos patients, considérons que les articles 52 et 91 (de la loi de 2004), concernant “L’usage du titre de psychothérapeute” seraient appliqués de manière inique, si ceux qui font exister ce titre en étaient exclus. »

Psy-en-mouvement invite les psychothérapeutes et leurs sympathisants à manifester lors d’un apéro géant, le 1er juillet à 19 h devant le tribunal de grande instance de Paris, 4 bd du Palais dans le 1er arrondissement, ainsi que sur tous les parvis des tribunaux des métropoles régionales.

> Lire l´appel.

Les psychothérapeutes s’étaient aussi organisés en fédérations pour réguler les pratiques de leurs membres, pour rendre crédible leur profession grâce à un haut niveau de formation validée à l’échelle européenne (l’European Association for Psychotherapy (EAP) délivre un Certificat européen de psychothérapie – CEP).

Dans ce cadre, les formations à l´une des multiples méthodes psychothérapeutiques (on dit qu’il en existe autant que de jours dans une année) comprennent la théorie, l’expérience sur sa propre personne, la pratique sous supervision et de vastes notions sur d’autres méthodes.

Sous l’égide du Psy’G (1966) et du SNPPsy (1981), ils avaient proclamé la nécessité de respecter les principes qui ont été repris, en 1990, dans la Déclaration de Strasbourg de l’EAP, à savoir l’indépendance et la spécificité de la psychothérapie ainsi que le libre choix du psychothérapeute et de la méthode d’intervention (Déclaration de Paris, sur le Droit à la Psychothérapie, 1998).

Enfin, de leur côté, les psychologues contestent le tableau paru en annexe du décret (voir ci-dessus) et en demandent la modification.

>> Cette dépossession du titre de psychothérapeute par ceux qui en avaient fait un métier spécifique a été encouragée par les organisations de psychiatres et de psychologues. Pour eux, la psychothérapie ne devait pas être une profession à part, c’était simplement une fonction de leur profession. Le député Bernard Accoyer, lui-même médecin et militant antisecte, a proposé son amendement qui, au départ, réservait le titre de psychothérapeute aux seuls médecins et psychologues. Le tollé qui a suivi a permis aux psychanalystes d’être reconnus légitimes au même titre que les deux autres professions. La loi reconnaît donc maintenant « les psychanalystes régulièrement enregistrés dans les annuaires de leurs associations ».

Or, ces associations sont simplement des regroupements des psychanalystes sous forme association 1901. Ni plus ni moins que les associations de psychothérapeutes ! Mais les psychanalystes bénéficient (encore, car ils sont fortement contestés en ce moment) d’une aura de respectabilité et de l’appui des intellectuels et médias nationaux.

Les psychothérapeutes se sont manifestement mal défendus. Ils auraient dû pointer dès le début cette incohérence de la loi et exiger d’être traités de la même façon que les psychanalystes.

Finalement, le problème de la régulation est simplement déplacé d’un cran : qui contrôlera ces praticiens qui ne pourront prétendre au titre de psychothérapeutes ? Sans parler des voyants et autres mages… En réglementant l’appellation, en la subordonnant à la médecine académique, la loi nouvelle risque de la vider de sa richesse, voire de son sens, et surtout d’engendrer un faux sentiment de sécurité…

Pour aller plus loin :

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1 commentaire pour cet article

  1. Comment un mouvement Psy digne de ce nom peut il être dirigé par monsieur Bruno Dal Palu.
    ceux qui veulent savoir qui est cet homme peuvent me contacter.
    Il est en particulier le fondateur de la secte ” le renouveau de l’Emetanalyse”. Il fait travaillé des psychopraticiens évangéliques dans le seul but de faire valoir son idéologies pseudo marxiste humaniste. Il a fondé le 20 octobre 2012 à soyons en ardèche le groupement sectaire que nous dénonçons ouvertement. appuyé par son grand ami le député Philippe Prat qui ne devrait pas tarder a se séparer de ses services. usant de pression familiale et sociale cet individu veux réduire ma parole au silence et détruire ceux et celles qui peuvent nuire à la secte. mauvaise coche.